Un reportage d’Isabelle Thomas et Guy Sabin, Alain Barnault, montage Alexandra Willot et Laurent Veliscek.
Cela peut sembler une Lapalissade, mais à Venise, l’eau conditionne tout ! Stefano sillonne quotidiennement la lagune à bord de son bateau. Il est marchand de fruits et légumes et nous donne quelques clefs pour comprendre l’approvisionnement de Venise : les marchés de gros et de poisson, le port de déchargement, les canaux d’accès à son étal. Ses clients sont fidèles et apprécient un tel commerce de proximité.
Car derrière l’image touristique de Venise, derrière les façades de ses somptueux palais, existe une vraie vie vénitienne, souvent originale… Cela commence dès le plus jeune âge, quand par exemple la crèche s’établit dans un ancien palais ! Laura a deux jeunes enfants. Sur le chemin de retour à la maison, nous partageons ses difficultés à passer les ponts avec une poussette, mais aussi ses joies à voir courir ses enfants sans risquer d’être renversés par une voiture… Même si l’appartement est plus petit ici qu’en terre ferme, et qu’il faut grimper trois étages à pied, elle ne changerait de ville pour rien au monde.
Lucia, elle, est originaire de Milan, mais Venise l’a conquise. C’est là qu’elle a décidé de vivre, et de peindre. Le prix des loyers pour un atelier à Venise a failli compromettre son séjour. Mais heureusement, Lucia a bénéficié de la reconversion de friches industrielles, sur l’île méconnue de la Giudecca. Aujourd’hui, elle travaille dans une ancienne brasserie, transformée en ateliers d’artistes.
Venise accueille quotidiennement deux fois plus de personnes qu’elle ne compte d’habitants. Dès lors, le ramassage des ordures doit être planifié en conséquence… Nous suivons aussi les pompiers qui doivent adapter leurs trajets aux marées et aux ponts qu’ils croisent sur leurs parcours. Daniele Carrero est chef d’unité. Avec lui, nous mesurons le labyrinthe des ruelles, l’état de fragilité de certaines demeures, et la vigilance dont font preuve les Vénitiens eux-mêmes, notamment en raison des risques d’incendie.
La police municipale veille également sur le Grand Canal, grâce aux caméras de surveillance et aux radars… comme dans n’importe quelle grande ville ! Mais à Venise, les limitations de vitesse sont avant tout destinées à protéger les palais…
L’eau est la raison d’être et de disparaître de Venise, où les inondations sont régulières… Nous assistons à une « acqua alta » impressionnante. L’origine du phénomène ? L’amplitude des marées et du vent de Sirocco. Toute la ville s’organise alors : sirènes, passerelles, déménagements de meubles… Autant de réflexes qui pourraient disparaître dans quelques années, si les grands travaux entamés depuis 2003 parviennent à contenir les marées les plus dangereuses. Des barrages mobiles devraient être relevés entre la lagune et l’Adriatique, en cas d’alerte. Le projet a pris pour nom Moïse…